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Joel Martine et le peuple-classe comme sujet altermondialiste et écosocialiste (Christian Delarue)
samedi 1er février 2014, par ,
Ses premiers développements apportent un volet culturel et même ethnico-national à la notion de peuple-classe, que pour ma part je limitais à un sens social ou de bloc de classes. Ce faisant, il "territorialise" cette notion qui jusqu’alors était abstraite et liée à l’affrontement entre oligarchie et peuple-classe. Ce faisant, encore et surtout, il enrichit un concept qu’il juge fécond théoriquement et politiquement.
Voici son article : "Le peuple-classe comme travailleur collectif dans l’économie-monde, et dans la transition éco-socialiste" (mars 2013)
- http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article1987 ou sur
- https://blogs.attac.org/groupe-societe-cultures/articles-cultures-anthropologie/article/le-peuple-classe-comme-travailleur
Il cite l’un de mes textes, celui publié sur Mouvements, qui est une défense développée de ce concept : Classe dominante et oligarchie contre peuple souverain et peuple-classe. Pour lier combat social et solidaire et combat démocratique.http://mouvements.info/Classe-dominante-et-oligarchie.html .
Dans un premier temps, il reprend le concept tel qu’élaboré et il le fait "travailler" notamment avec une dynamique psycho-sociologique. Il écrit : "Il faut comprendre par quelles expériences et quels discours le peuple peut se construire comme une communauté vivante et désirable. Ce chantier est nécessaire pour éclairer les chemins concrets d’une alternative politique et économique. Sinon le désir de communauté est facilement manipulable par le nationalisme. Le peuple-classe est à construire contre la démagogie de la haine ethnique, et c’est difficile. Notamment la mobilisation politique du sentiment de communauté nationale contre l’oligarchie, le patriotisme de gauche, est à la fois légitime, indispensable, et risquée."
Dans un second temps, il réancre le concept dans les rapports sociaux de production. Ce que je n’avais pas fait, estimant que l’ordre des classes des marxistes y répondait déjà et que l’ordre des peuples se posait à un autre niveau, par rapport à la finance et à son oligarchie. Pour moi le peuple-classe travaille, y compris le groupe social aisé des 9% sous le 1% mais ce travail peut être du travail indépendant (professions libérales aisées ou autres) comme du travail salarié de cadres supérieurs ; et même des fonctions de direction de dirigeants d’entreprises petites et moyennes. Il y a donc, semble-t-il une différence conceptuelle à préciser. Souvenons-nous que le 1% ne travaille pas il renforce chaque jour son capital financier qui fait qu’il surplombe de très haut le reste de la société. Il n’y a d’ailleurs pas vraiment société avec eux mais profond clivage, béance sociale et nationale.
Dans un troisième temps, Joel Martine voit dans le concept de peuple-classe l’outil de la transition éco-socialiste car il est "l’opérateur collectif du système d’interaction entre l’humanité et la nature" et "l’opérateur de cette transition ne peut être que le travailleur collectif avec ses articulations concrètes ... et pas seulement ni même principalement la classe ouvrière comme dans les schémas marxistes classiques". Alors que pour ma part, la dimension écologique comme d’ailleurs, celle anti-sexiste et antiraciste, arrivait par la lutte dans une perspective interne/externe, Joel Martine en fait une auto-transformation interne liée à la démocratisation comme "chose" du peuple-classe. Il écrit : "Cette auto-transformation du peuple passe par la mise en place de tout un puzzle ou mieux un éco-système d’utopies concrètes, enclenchant non seulement une démocratisation radicale et une planification écologique, mais aussi une transformation du travail lui-même : le développement de formes d’activité coopératives qui échappent au salariat capitaliste et par là installent des bases économiques pour un empowerment économique et intellectuel du peuple : coopératives, entreprises publiques cogérées, contrôle des travailleurs dans les entreprises capitalistes, démocratie locale notamment pour le pilotage de l’économie."
Enfin, avec Immanuel Wallerstein il fait du peuple-classe un outil matérialiste-historique de la libération des peuples dans le cadre de l’économie-monde.
Christian DELARUE