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8e PCRD Pour une autre recherche en Europe (SNESUP, 2011)

dimanche 7 avril 2013, par Commission Enseignement-Recherche

A la fin de cette année 2011, la Commission européenne doit émettre une proposition de Programme cadre pour la recherche devant couvrir la période 2014-2020. Puis, avant fin 2013, le conseil des ministres des 27 États membres chargés de la recherche et le Parlement européen devront s’accorder sur une version finale.

Le Programme cadre pour la recherche qui a cours actuellement, le 7e PCRD, couvre la période 2007-2013. Conformément à la Stratégie de Lisbonne, il repose sur une vision utilitariste de la recherche centrée sur la compétition économique mondiale. Une compétition dont on veut nous faire croire que la contrainte est naturelle, alors que celle-ci découle du choix délibéré des gouvernements des États membres de l’UE d’une intégration de l’Europe à un marché mondial totalement dérégulé. Le 7e PCRD participe ainsi aux difficultés croissantes que rencontre la recherche dans l’accomplissement de l’ensemble de ses missions.
Le projet de 8e programme, dénommé par la commission européenne Programme cadre pour la recherche et l’innovation, s’inscrit dans la stratégie Europe 2020. Le site officiel de l’Union européenne nous en donne une présentation :
« Le but ultime est de maximiser la recherche et l’innovation financées par l’UE, pour une croissance durable et pour l’emploi, ainsi que pour s’attaquer aux grands défis que doit relever l’Europe - par exemple le changement climatique, la sécurité alimentaire et énergétique, la santé et le vieillissement de la population.
Cela doit être atteint en créant une série cohérente d’instruments, tout le long de la « chaîne de l’innovation » et à commencer par la recherche fondamentale, débouchant sur l’apport au marché de produits et de services innovants, et aussi sur le soutien à l’innovation non technologique, par exemple aux niveaux de la conception des produits et du marketing. »
Certes, une place est donnée à la recherche fondamentale, mais uniquement au service de l’innovation entièrement tournée vers le profit. Si certaines sciences humaines et sociales sont convoquées, elles le sont essentiellement dans une perspective purement utilitariste.
L’UE aujourd’hui réduite à une Union-entreprise soumet toujours plus les sociétés européennes, les hommes et les femmes aux marchés et à la finance. Elle doit se libérer de cette orientation dévastatrice et lancer la construction d’un tout autre projet de sociétés. Le 8e Programme cadre pour la recherche doit participer à cet objectif. A l’heure d’une crise mondiale exponentielle le rôle de la recherche doit être redéfini. Celle-ci ne peut être toujours plus canalisée, détournée et finalement asséchée dans le seul but de répondre aux besoins du marché, mais doit au contraire couvrir l’ensemble de ses missions et contribuer aux remises en question et à l’élaboration d’alternatives à notre mode de développement, à nos conceptions de l’économie, de la production et de la consommation.
L’Union européenne et ses États membres se doivent et ont les moyens financiers et humains de mettre en œuvre un plan public de recherche d’une hauteur sans commune mesure avec ce qui a cours aujourd’hui, reposant sur des coopérations européennes et internationales. Ce plan devra viser tout à la fois le développement d’une recherche non finalisée, indispensable pour préparer l’avenir et élargir le champ des connaissances ; d’une recherche répondant aux besoins sociaux et environnementaux, et contribuant aux solutions à apporter à la situation de crise, allant des avancées technologiques et techniques aux indispensables transformation du système économique et social ; et d’une recherche comme outil de la démocratie et de la pensée critique et émancipatrice.
La recherche en sciences humaines et sociales, incluant l’économie, a un rôle indispensable à jouer dans la sortie de crise, par exemple en analysant les processus mettant aujourd’hui en danger la démocratie et en concevant et diffusant les moyens d’un regain démocratique.
Nous considérons comme central de préserver les logiques différentes et leurs traductions en termes d’objectifs et de moyens entre recherche fondamentale et recherche appliquée. Le niveau européen doit s’engager à maintenir ces deux approches. La recherche nécessite le respect des libertés académiques et des logiques et rythmes propres à ses différents champs.
Le projet de budget du 8e PCRD s’élever à 80 milliards d’euros, répartis sur une période de sept ans, soit de l’ordre de 0,08% du PIB européen. Ce montant doit être multiplié et dépasser 0,2% du PIB européen. Tous les champs disciplinaires doivent être développés, dans leur diversité, en particulier les sciences humaines, économiques et sociales : le 7e PCRD ne leur a consacré que 0,6 milliards d’euros sur une période de sept ans (soit 0,0006% du PIB).
Les financements européens ne doivent pas participer à l’étouffement du développement des connaissances de certains champs disciplinaires ou relevant de la collaboration entre organismes ou institutions de recherche indépendants.
Les orientations de la recherche, domaine aux résultats dont les conséquences sociétales sont éminentes, doivent être définies en toute transparence, avec la participation de la communauté des chercheurs et des enseignants-chercheurs et à l’issue de débats publics et démocratiques. Des choix, y compris ceux définis comme prioritaires et présentés comme des évidences, doivent être repensés.

Le SNESUP s’engagera pour peser sur le travail législatif portant sur le 8e PCRD, en s’adressant aux collègues, à la population, aux syndicats partenaires en France et en Europe, et en animant avec des organisations partenaires une campagne à l’adresse des parlementaires européens.