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Lutte contre la répression policière et administrative

Martine Boudet membre du CS

mardi 11 octobre 2016, par Groupe Société-Cultures

C’est un fait en voie d’être reconnu, le pays dérive vers des formes d’arbitraire et d’Etat de non droit.

Ce qui est inquiétant également, c’est que ce phénomène est perçu médiatiquement à l’envers, ou exclusivement du côté des agresseurs venus du terrorisme ou des banlieues ; la répression exercée par des forces de l’ordre à l’encontre des mouvements sociaux et citoyens est éludée. Des émissions parlent de menaces de guerre civile, ce qui amplifie une confusion paranoïde.

Le déficit de prise de conscience et d’organisation dans notre camp, pour parer à la répression étatique, résulte de facteurs conjugués :
-l’individualisme citoyen qui entrave les réactions spontanées de solidarité à l’égard des premières victimes ; celles-ci sont souvent laissées à leurs seules forces, face au rouleau compresseur de la police, de la justice, de l’administration : des conseils de discipline ont été convoqués dans des lycées parisiens, marseillais au moment de la mobilisation contre la loi Travail...
- le dirigisme de la plupart des organisations au sommet, qui reflète souvent indirectement le centralisme autoritaire de l’Etat, ce qui constitue un obstacle à l’adaptation à la nouvelle période, et par conséquent à la promotion de nouvelles revendications.

Cela semble être un passage obligé : c’est quand un peuple est au pied du mur qu’il est obligé, pour sa survie politique, de "se bouger" et donc de changer de paradigme. La dérive autoritaire a démarré grosso modo avec l’instauration de l’état d’urgence et du discours sécuritaire, qui a succédé à une première partie de mandat hollandien austéritaire. C’est à ce double bloc institutionnel que s’est heurtée la mobilisation contre la loi Travail, à la différence de la mobilisation contre le Contrat première embauche/CPE en 2006.
Ayant un Etat dominant à l’échelle internationale (c’est le pays impérialiste le plus exposé aux attentats), le peuple français commence par ailleurs à payer la note de ses exactions à l’étranger. Un retour de bâton opéré par l’oligarchie qui se déresponsabilise sur le dos des peuples des déficits (géo)politiques que sa gestion unilatérale occasionne.

En toute logique, l’une des revendications à faire valoir est le refus de cette culture de violence multilatérale qui gagne le pays et singulièrement l’Ecole, et qui ouvre un boulevard au FN, dont le gouvernement applique d’ores et déjà le programme en matière de maintien de l’ordre. La lutte pour l’égalité socio-économique (contre l’échec scolaire par exemple) va certainement perdre des points d’appui, en cas de présidence de droite l’an prochain. En complément (et pour changer de braqué), la reconquête démocratique passe par le respect de la paix civile et des droits politiques fondamentaux. Un peu comme dans les dictatures françafricaines, où les peuples se battent sur des perspectives forcément basiques, par exemple pour le respect du suffrage universel au Gabon récemment.

Cette expérience est probablement nécessaire pour se rappeler les fondamentaux : il existe peu d’Etats neutres, encore moins bienveillants, ceux-ci sont souvent instrumentalisés par les forces dominantes à leur profit. C’est le cas en France dont l’Etat social, jusqu’alors important, a fondu comme neige au soleil avec l’ère austéritaire ; il risque à terme de ne plus rester que l’ossature de l’Etat régalien, dont les rigueurs fascisantes étaient réservées jusque là aux peuples francophones d’Afrique (le "pré-carré" néo-colonial).

Différents collectifs de lutte contre la répression policière et administrative -collectif Tolbiac-Goodyear, comité de vigilance "La lutte est un droit", UNPA/Urgence notre police assassine....- sont nés de ces constats. Il faut espérer qu’ils coordonnent leurs activités et favorisent la collaboration des mouvements sociaux et des quartiers populaires, qui sont les premiers exposés à cette politique. L’idée de porter plainte contre les pouvoirs publics, pour exposition aux risques de mort ou de blessures, est également légitime, et intéressante à promouvoir.