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Le 3e mandat présidentiel : un dispositif dictatorial (ADDEA)

Association pour la défense des droits de l’eau et de l’assainissement (Sénégal)

dimanche 24 janvier 2021, par Groupe Afrique

La démocratie, régime politique dont la vitalité s’exprime surtout à travers le respect de la Constitution, l’organisation d’élections libres permettant l’alternance au sommet de l’Etat est de plus en plus menacée, voire niée en Afrique de l’Ouest. Notamment avec le vent des révisions opportunistes de la Loi fondamentale par les dirigeants pour s’éterniser au pouvoir.

Dans cet élan anti-démocratique, Alpha Condé et Alassane Ouattara viennent d’être élus à la tête de leurs pays respectifs avec leurs lots de morts et de divisions profondes. A qui le tour prochainement ?

LES CONTRE-EXEMPLES EN COTE D’IVOIRE, AU TOGO ET EN GUINEE

Malgré les protestations d’une opposition unie, malgré les violences des forces de l’ordre et les morts de citoyens, le président ivoirien, Alassane Ouattara, candidat à un troisième mandat, a fait organiser le scrutin, le 31 octobre 2020.
Et ce dictateur a tout bonnement été réélu pour cinq nouvelles années, tout comme Faure Gnassingbé se fait réélire sans discontinuer depuis 2005 au Togo, à la suite de son père. Tout comme son comparse, Alpha Condé, qui a réussi son coup de force constitutionnel, décrochant, à 82 ans, son troisième mandat.

ÇA SENT LE ROUSSI AU SENEGAL

Quid du Sénégal qui a modifié sa Constitution en 2016, limitant les mandats présidentiels à deux consécutifs, et précisant en son article premier que : « La durée du mandat du président de la République est de cinq ans. Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs » ?
Le moins que l’on puisse dire, c’est que ça sent le roussi avec deux camps distincts composés de pro et anti troisième mandat. Les spéculations sur une troisième candidature de l’actuel président en 2024 vont bon train, gagnant les rangs des praticiens du Droit, dans l’impossibilité de s’accorder sur une même interprétation de la Loi. La position ambigüe du président, à savoir sa réponse « ni oui » « ni non » à une autre candidature, n’aidant pas à une lecture visible du jeu politique, le spectre du troisième mandat présidentiel ou du mandat de trop continue de roder dans le pays. Les limogeages et exclusions du parti présidentiel de Sory Kaba, directeur des Sénégalais de l’extérieur, et de Moustapha Diakhaté, ancien président du groupe parlementaire Benno Bokk Yakaar, pour leur position ferme sur l’impossibilité constitutionnelle du président de briguer un troisième mandat, n’augurent rien de bon.

LES BELLES LEÇONS DEMOCRATIQUES DU NIGER ET DE LA MAURITANIE SERVIRONT-ELLES ?

De toute évidence, la tentation du troisième mandat présidentiel est en passe de gangréner le champ dit « démocratique » de moult pays africains. Dans la sous-région africaine, aucun régime ne semble pouvoir échapper à la tentation anticonstitutionnelle, consistant à tripatouiller la Constitution pour rempiler encore et encore à la magistrature suprême.
Pourtant, des pays ont brisé cette ère des présidents à vie, qui semblait être indissociable du jeu politique africain. L’exemple du Niger, où le président Mahamadou Issoufou a fini par concrétiser sa décision de ne pas briquer un troisième mandat, en mettant en selle son dauphin et le futur candidat de son parti à la présidentielle, en l’occurrence le ministre nigérien de l’Intérieur, devrait être mise en exergue. Le président mauritanien, Mohamed Ould Abdelaziz avait aussi apprivoisé toutes les appréhensions et craintes nourries autour de sa volonté de briguer un 3ème mandat, en poussant son poulain Ghazouani à la présidence, à l’issue d’élections finalement acceptées par l’opposition.

LA SOCIETE CIVILE AFRICAINE
a sa partition à jouer, elle doit faire émerger ses idées et ses revendications, lors de la rédaction ou de la modification des Constitutions.