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Résolution sur la question du travail et du revenu inconditionnel

jeudi 16 janvier 2014, par Frédérique Perrin

ATTAC propose à chaque adhérent de contribuer à l’orientation et à l’action à venir par une résolution destinée à :

  • « Approfondir le débat »
  • « Aider au positionnement d’ATTAC »
  • « Alerter sur des nouvelles problématiques ».

Je souhaite que ma résolution soit utile à ATTAC pour :

  • Approfondir le débat sur la question du travail. En effet, lors de l’université d’été de Nîmes en 2013, j’ai estimé que cette question restait prisonnière de l’idéologie dominante dans la façon dont elle était abordée (atelier « travail », atelier « féminisme » et plénière finale, en particulier). Le présupposé était que « le fait d’avoir un travail libère » et que l’on aspire au « plein emploi ».
  • Assumer une position claire de rupture avec le capitalisme et se dégager de la tentation d’accompagner/aménager le capitalisme comme le font les principales organisations syndicales.
  • Se rapprocher de la réflexion de certains penseurs (Gorz, Friot, Ariès, Zin…) qui montrent un nouveau possible en matière de rapport au travail, dégagé de la place dans laquelle le marché de l’emploi nous consigne.

« Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant » : Déclaration universelle des droits de l’homme, article 25 (1948).

Ce droit passe par un revenu pour tous, inconditionnel et suffisant, dissocié de l’emploi salarié, détruit, précaire, aliénant, que l’idéologie dominante nous présente comme « désirable ».

Ce droit à un revenu pour tous s’inscrit dans un projet politique qui suppose la réappropriation de la richesse que tous, salariés ou non, nous produisons, qui suppose aussi le contrôle de l’émission de monnaie(s), qui suppose également des choix de production autogérés par les citoyens en fonction de leur utilité sociale.
Ce droit à un revenu pour tous libère le travail, libère notre énergie pour contribuer au bien-être social, en nous dégageant de la domination du marché de l’emploi et de la peur du lendemain.

ATTAC peut jouer son rôle d’association d’éducation populaire en nous aidant à dessiner concrètement les contours d’une société libérée de l’asservissement de l’emploi au lieu de rester dans l’illusion qu’entretient la revendication d’un « emploi pour tous ». Plutôt « un revenu pour tous » pour un travail et des humains libérés !

Cette résolution est proposée par Frédérique Perrin.

Soutenue par le comité local Attac 19.

Messages

  • Nous soutenons complètement cette analyse qui exprime, à cent pour cent, celle que nous faisons depuis très longtemps.
    Ce serait un tournant salutaire pour Attac de la prendre enfin en considération, au lieu de continuer à chercher quels moyens du passé, inadaptés à ceux du présent (et encore moins à ceux du futur prévisible), permettraient de retrouver un illusoire “plein emploi” !
    L’opposition à cette abolition du salariat relève de la même démarche que celle qui s’opposa jadis à l’abolition de l’esclavage, puis à l’idée que les salariés aient droit à un repos, puis, après encore quelques décennies, à des congés payés.
    Nous appuyons les membres d’Attac qui, au lieu de rêver à un retour du passé, auront enfin le courage de tenir compte des moyens de production d’aujourd’hui pour imaginer l’avenir.

    • Bonjour

      Je soutiens évidemment cette résolution.

      Pour des éléments d’argumentation, je me permets de renvoyer au texte que j’ai co-écrit avec Baptiste Mylondo dans la nouvelle Revue éditée à l’initiative du Conseil scientifique d’Attac, Les Possibles, n° 01 Automne 2013.

      http://france.attac.org/spip.php?page=revue-cs&id_article=1309&id_newsletter=1

    • On est sur le même chemin.
      La réflexion relative au Revenu Inconditionnel est l’axe de réflexion que nous nous sommes donnés, hier soir, lors de notre CA du Comité Local Libournais.
      ATTAC doit être icvonoclaste ou se fondre dans un magmas déliquescent.

    • Cette résolution vous doit beaucoup (lire vos articles dans la revue Mouvements n°73 sur "Un revenu pour exister"), ainsi qu’à d’autres créateurs d’une pensée nouvelle hors du cadre idéologique qui nous emprisonne.

      Frédérique Perrin/Pierre Chastang

    • Je soutiens les propositions précédentes et suggère d’élargir le débat approfondi dans Attac aux différentes formes de répartition du revenu et leurs combinaisons : revenu inconditionnel ? dotation universelle d’autonomie ? salaire à vie ? réduction massive du temps de travail ? financé par quelle fiscalité ? quels prélèvements obligatoires ? quels échanges non étatiques et non marchands ?
      quels problèmes ces "solutions" prétendent-elles chacune résoudre ? Quels sont leur intérêt propre et leurs dangers potentiels, du point de vue social, économique, et même anthropologique ? Quelle est leur faisabilité et leur potentiel anti-capitaliste ? etc...
      Je propose pour cela de créer une commission précarité, ouverte à tous les adhérents et sympathisants, précaires et chômeurs en priorité. Elle organisera la réflexion et des débats ouverts et contradictoires, avec l’ensemble des structures (CL, CNCL, CA, CS, autres commissions).

  • Votre résolution a le mérite d’inciter à ouvrir un chantier de réflexion et un débat sur un sujet peu abordé jusqu’à présent au sein d’Attac.

    Toutefois, il n’est pas possible à notre avis de proposer dès l’AG de mai des résolutions promouvant une seule solution (le revenu universel) à la question de l’organisation et du partage du travail, sans qu’il y ait eu auparavant un débat approfondi sur la question : quelle solution privilégier : revenu inconditionnel ? dotation universelle d’autonomie ? salaire à vie ? réduction massive du temps de travail ? quels problèmes ces "solutions" prétendent-elles chacune résoudre ? Quels sont leur intérêt propre et leurs dangers potentiels, du point de vue social, économique, et même anthropologique ? Quelle est leur faisabilité et leur potentiel anti-capitaliste ? etc...

    Nous souhaitons effectivement, par respect de la démocratie, que s’ouvre un vrai travail sur ces questions, enrichies par des ateliers CNCL et des apports du Conseil Scientifique, et non que l’AG se prononce sur une solution avant même que ce débat ait eu lieu

    Marie-Danielle Dufourt et Michel Artigue, attac 05 nord

  • Bonjour à tous !
    Je fais partie du Mouvement Français pour un revenu de base et défends à ce titre le rdb, le plus largement possible pour l’instant, afin de permettre un débat le plus démocratique possible.
    J’aspire cependant, à titre personnel, à ce que la gauche s’empare du sujet pour défendre un rdb suffisant et digne.
    Après avoir approfondi la comparaison avec le salaire à vie, il m’apparait que le rdb pourrait être une bonne transition pour libérer chacun et donc tous et renverser les rapports de force et certains conditionnements qui enferment effectivement les plus militants d’entre nous.
    il existe plusieurs versions du revenu de base et les questions soulevées sont déjà perturbantes, je rejoins celles posées ci-dessus : réussir à se débarrasser de ce lien méritocratique qui réduit la dignité de l’individu à son travail rémunéré et plus largement à son "utilité" pour la société, questions sur la motivation au "travail", avec les nuances d"’activité", d’"emploi", confiance en l’individu pour faire des choix bons pour lui comme pour les autres ...
    Bref, tout cela vaut bien qu’on en discute et je pense que les membres du mfrb seront dans chaque région volontaires pour en débattre. n’hésitez pas à les contacter (site mfrb ou revenudebase.info)
    Perso, j’ai déjà fait le lien à Lille et les échanges ont été très riches !
    à très bientôt !
    virginie

  • Il y a trois propositions sur le travail et le revenu inconditionnel.
    Dans tout cela il y a un chiffre, un seul, pour soutenir le réalisme de la proposition : On a pris le PIB de la France et on l’a divisé par le nombre d’adultes !

    Ce matin un artisan est venu laver les vitres de ma loggia, générant ainsi une TVA et donc un PIB. Y a-t-il eu « création de richesse » ?
    J’en doute. Un revenu inconditionnel est du vent pour la part basé sur cet élément du PIB.

    Le problème que nous avons à résoudre est le fonctionnement d’une société, d’un Etat, d’une collectivité. La finalité étant de faire du social et de l’environnemental. Le social étant ce qui est avantageux pour l’humain et l’environnemental y intégrant les limites de la planète, les limites du possible.

    Pour ce problème je classe les travailleurs en deux catégories : Ceux qui produisent des biens matériels : Nourriture, vêtements, logements, outillages, et ceux qui n’en produisent pas, bien que forts utiles à la collectivité : Educateurs, médecins, juges, gendarmes...
    Les seconds ne peuvent exister que si les premiers leur fournissent nourriture, vêtements, logement, et outillage.

    Un médecin, un enseignant, consomme nourriture, vêtements, a besoin d’un logement, utilise un scanner ou un bâton de craie.
    Ces biens matériels ne sont créés que par l’agriculture et l’industrie. L’informatique n’y entre que dans la mesure où elle participe à la production.

    Or, notre agriculture est en difficulté, et notre industrie est partie en Chine. Pendant des années les gouvernements successifs on compensé le manque de rentrées fiscales du à l’insuffisance de production de biens matériels, réels, pour alimenter les travailleurs sociaux, (santé, éducation, justice, etc…) par des emprunts : Déficit de la Sécurité Sociale, déficit de l’Etat, des collectivités. Cela faisait bien les affaires des détenteurs de capitaux qui prêtaient à des conditions avantageuses.
    Très exactement le manque de production intérieure a été compensé par des importations. Un déficit chronique du commerce extérieur se traduit forcément par un endettement quelque part. Et quand on a un créancier sur le dos, on perd sa liberté.

    La droite, et les sociaux libéraux prennent prétexte de cette dette pour prétendre que la France a vécu au dessus de ses moyens.
    Je dis à l’inverse que la France a très exactement produit en dessous de ses besoins.

    Nous avons à réinventer notre économie. La production de biens matériels est limitée par les possibilités de la planète, nous devons optimiser cette production en construisant une civilisation qui y soit adaptée, qui s’en satisfasse.
    Quant aux besoins sociaux, santé, éducation, culture, protection de l’environnement, recherche scientifique, arts, ils sont et resteront illimités.

    On nous dit que l’allocation universelle permettrait de nous adapter à la fin du plein emploi. Mais la fin du plein emploi n’est pas une calamité qui s’est abattue sur notre pays, c’est une situation que les financiers libéraux et les politiques ont voulu. Ils ont volontairement eu recours au chômage pour bloquer les revendications des travailleurs et accroitre les profits.

    La preuve : depuis l’invention du RMI chaque gouvernement nous annoncent régulièrement, pour combattre le chômage, toutes sorte de contrats aux noms pleins d’illusion, pour les jeunes, les vieux, et toutes sortes d’aides financières et d’incitations fiscales.
    On conviendra volontiers qu’un employeur n’embauchera pas un jeune, ou un vieux parce qu’il a un contrat mirifique à lui proposer, ou une aide à recevoir mais si, et seulement si, il a un travail à lui faire faire.
    Le capitalisme peut-il produire en France dans une situation de concurrence sauvage ?

    Nous devons inventer des modes de production déconnectés de la concurrence pour pouvoir réinstaller notre industrie en tenant compte des possibilités de la planète.

    Les gains de productivité ne sont pas un facteur de chômage. Ils font simplement que la production de base requiert moins de main d’œuvre, ce qui en laisse davantage pour les autres besoins sociaux et environnementaux.

    Et permettent aussi d’avoir plus de temps libre. Semaine de 35 heures, congés payés, retraite à 60 ans…

    Un petit codicille : Dans mon classement des travailleurs en deux catégories, je place où les commerçants ?
    Dans la mesure où ils sont utiles ils entrent dans la deuxième catégorie. Si dans une ville il faut 5 commerces pour telle chose et qu’il y en a 10 ou 20, il y a 5 ou 15 de trop. L’inflation des commerces excédentaires est une caractéristique d’une économie en faillite.

    • Bravo pour tes réflexions pragmatiques et qui pose les problèmes basiques.
      Tu analyse bien la situation. Il y a :
      "Ceux qui produisent des biens matériels : Nourriture, vêtements..... et ceux qui n’en produisent pas, bien que forts utiles à la collectivité : Educateurs, médecins......
      Les seconds ne peuvent exister que si les premiers leur fournissent nourriture, vêtements..."
      Or, la situation de concurrence sauvage, profite aux seuls actionnaires, et ne peut qu’entrainer le dumping social et les délocalisations vers les pays à moindre coût de production. Tu dis :
      " le manque de production intérieure a été compensé par des importations. Un déficit chronique du commerce extérieur qui se traduit forcément par un endettement....on perd sa liberté".
      "Nous devons inventer des modes de production déconnectés de la concurrence pour pouvoir réinstaller notre industrie "

      Pratiquement comment faire ? comment maitriser notre économie ? :

      Deux ou trois pistes de réflexion qui peuvent être complémentaires :
       Transférer le pouvoir dans les entreprises des actionnaires vers les travailleurs ; des projets de loi existent à gauche, conduisant à terme, à rendre les travailleurs majoritaires dans les décisions. Ainsi les travailleurs devenu enfin citoyen dans leur entreprise (Jaurès) déciderons de leur sort et de leur production.
       Maitrise de la création monétaire (banque publique) pour s’affranchir de la domination des marchés financiers, pour pouvoir prêter à faible taux, dans l’intérêt des citoyens.
       Taxes douanières anti dumping social, fiscal et environnemental, qui peuvent être appliquées dans un esprit de protectionnisme solidaire (on peut reverser tout ou partie de la taxe aux pays que l’on veut aider..)

      Hubert.viallet@orange.fr
      ATTAC Marseille

  • Je sors d’un CA du comité local d’Attac en Libournais.
    Je n’avais pas pris connaissance de ta proposition.
    Coïncidence et collision des réflexions...nous avons décidé à 22h que notre travail de cette année (lectures, compilations, rencontres, propositions, ouvertures au débat...) serait axé sur "Le Revenu de base", "Revenu Incondidionnel"...
    Nous pensons également qu’ATTAC France, ses comités locaux, ses "penseurs" devraient s’engager à fond dans cette réflexion qui permettra, en outre, de retrouver le côté iconoclaste de notre positionnement, de nos réflexions et propositions afin aussi de notre un souffle nouveau à notre dynamique qui s’essouffle, voire ronronne.
    Donc, d’accord avec ta proposition de résolution sur le revenu inconditionnel autour de :
    « Approfondir le débat »
    • « Aider au positionnement d’ATTAC »
    • « Alerter sur des nouvelles problématiques ».
    Puis-je ajouter, aux "réfléchisseurseurs" le nom de Baptiste Mylondo dont les écrits et intervention (cf "arrêt sur image" du 3 janvier qui réunissait Friot-Mylondo-Husson (d’Attac))
    Marcel Cassoudebat
    Co-Président
    Attac en Libournais 33

  • Je soutiens cette résolution
    je demande qu’ATTAC planche sur des propositions concrètes et chiffrées étayant la demande du "revenu d’existence pour tous" conforme à la déclaration universelle des droits de l’homme

  • Participer à la production de l’existence sociale est important ! C’est une obligation qui pèse sur chacun(e), à l’âge adulte en société ! Il y a des atténuations et des exceptions que je ne cite pas !

    Cette participation là passe, de nos jours, sous le capitalisme dominant, par le travail salarié surtout, privé ou public, indépendant parfois. Ce qui importe à mes yeux, c’est que celles et ceux qui travaillent déjà travaillent moins, beaucoup moins, tout en ayant de meilleurs salaires ou traitements ET que celles et ceux qui ne travaillent pas puissent enfin travailler, mais pas en passant de rien à travailler plus haut, plus vite, plus fort tel un champion olympique !

    IL NE FAUT PAS ABANDONNER LA REVENDICATION DE RTT VERS 30 HEURES HEBDO !

    BAS REVENUS AUGMENTES soit 1500 euros net pour le SMIC, plus aussi pour les minimas sociaux !

    TRES HAUTS REVENUS BRIDES - maxi = 10 FOIS LE SMIC revendiqué puis plus bas encore jusque’ à 5 fois par exemple. A débattre !

  • Les trois résolutions intitulées « Résolution sur la question du travail et du revenu inconditionnel », « Désaliéner du travail pour se libérer de l’emploi » et « Résolution sur la question du travail » sont empreintes du souci de critiquer la forme dominante que le capitalisme impose à l’activité humaine. Mais leurs formulations, d’une art, remettent cause ce qui avait été acquis dans Attac au cours des dernières années, et, d’autre part sont entachées, sinon d’erreurs, du moins de considérations très contestables et très contestées.

    1. Attac avait déjà adopté la position selon laquelle tout individu a droit à un revenu mais que cela ne supposait pas l’abandon de la recherche de la suppression du chômage, donc de l’objectif du plein emploi de tous ceux qui le souhaitent, et d’un emploi décent.
    2. L’abandon de cet objectif et le repli sur la proposition de revenu inconditionnel ou d’existence admet implicitement que tous les individus ne peuvent pas s’insérer dans toutes les sphères de la société, faisant le miel des présupposés néolibéraux et de leurs préceptes politiques qui n’aspirent qu’à libéraliser un peu plus ledit marché du travail.
    3. La proposition de revenu inconditionnel oscille entre la croyance qu’un revenu monétaire pourrait provenir d’un ailleurs que le travail collectif et celle que la société pourrait une somme d’individus décidant, seuls, de leur activité, sans qu’il y ait à un quelconque moment une validation collective, sociale, de cette activité, tout en pensant qu’une manne monétaire tombe du ciel, sans cette validation. Ainsi, il est dit dans l’une de ces résolutions : « En effet, l’énorme richesse dont nous disposons (3300 euros/ personne majeure et/ mois !), permet de donner à chacun un salaire à vie suffisant (2200 euros au moins) pour lui assurer l’autonomie nécessaire. Il nous faut utiliser ce levier d’un salaire à vie suffisant pour sortir du capitalisme. » Cela signifierait-il ou bien qu’on prend la richesse produite par le capitalisme pour sortir de celui-ci ? Ou bien qu’on considère que les revenus sont un prélèvement sur un stock préexistant, alors qu’il sont toujours un flux ?

    Un adhérent internaute commentant l’une de ces résolutions appelle à l’appui de son argument le texte de Baptiste Mylondo et Michel Lepesant que j’ai sollicités pour écrire dans le premier numéro de la revue du Conseil scientifique d’Attac Les Possibles. Mais l’honnêteté commande de signaler, à côté du précédent, un texte critique que j’ai écrit. On ne peut décider d’une position aussi importante sans débat, et certainement pas à la suite d’un vote de résolution auquel les adhérents seraient appelés sans qu’il ni de lieu ni de moment pour en discuter : http://france.attac.org/spip.php?page=revue-cs&id_article=1309&id_newsletter=1 et http://france.attac.org/spip.php?page=revue-cs&id_article=1307&id_newsletter=1.

    Jean-Marie Harribey

    • Au lieu de se figer dans ce que Jean-Marie appelle « ce qui avait été acquis dans » Attac (il ne dit pas acquis par Attac), souhaitons plutôt qu’Attac soit capable d’évoluer, grâce à des débats internes… et démocratiques, même si dans ces débats ses propres considérations sont, à leur tour, contestées. Ce que je me permets de faire ci-dessous :

      1. Non, le versement d’un revenu inconditionnel ne suppose pas « l’abandon de la recherche de la suppression du chômage ». Par contre, il permet le « plein emploi de tous ceux qui le souhaitent » … si des emplois leur sont proposés, mais il permet surtout, et c’est important et c’est nouveau, de les refuser par ceux qui les trouvent “indécents” soit par leurs objectifs, soit par leurs conditions de travail ou de salaire.
      D’où l’importance du montant de ce revenu : il doit être suffisant pour permettre de tels refus, qui sont impossibles sous la menace de n’avoir pas de quoi vivre. Quant un néolibéral accepte l’idée que l’État puisse garantir un revenu minimum, c’est en pensant que pourrait s’exercer ce chantage : « tu es assisté, alors tais-toi… et si tu veux gagner plus, accepte mes conditions ! ».
      Ainsi, au niveau de l’individu, le revenu inconditionnel et suffisant permet que le chômage ne soit plus synonyme d’exclusion, qu’il ne désigne pas le chômeur comme étant incapable ou indigne.

      2. L’objectif du plein emploi, présenté par Jean-Marie comme étant celui établi une fois pour toutes à Attac, pose une question bien plus générale. Gardons-nous de répéter que c’est bien de créer des emplois sans jamais préciser pour quoi faire : il y a déjà beaucoup trop d’emplois dans la publicité, dans le bourrage des crânes, dans la programmation d’obsolescence, sans compter ceux des conseillers en fiscalité et des traders, etc… Et les emplois qui se créent maintenant sont des emplois précaires : si tous les actifs n’avaient que des jobs à un euro de l’heure, dirait-on que le plein emploi est atteint ? Et la durée d’un temps plein, est-ce que le législateur ne peut pas la réduire ?

      Est-ce donc bien de définir ainsi notre objectif ? Celui-ci est-il que tout le monde ait un emploi salarié, autrement dit que toute activité soit mise sur le marché du travail ? À mon avis, non. Parce que je ne crois pas qu’il soit nécessaire, ni même possible, de compter, pour les payer, les heures passées dans toutes sortes d’activités fort utiles mais qui, aujourd’hui, ne sont pas rémunérées.
      Ce qui me paraît important c’est, d’abord, que tout le monde ait de quoi vivre en étant libre de choisir son mode de vie. C’est donc tout le contraire de l’idéologie néolibérale que de reconnaître, pour reprendre l’expression de Jean-Marie, qu’il y a des « sphères de la société où il est possible de s’insérer » sans être “payé pour ça”… et sans déchoir ! Ce qui importe c’est que soit reconnue toute activité “utile” (il faudra débattre de ce terme, admettre, par exemple, qu’on peut être utile en faisant des études, en prenant une année sabbatique pour mener une enquête, en acceptant certaines responsabilités, en assistant un proche, etc), et que ceux qui choisissent ce genre d’activités non “marchandisées” aient les moyens de le faire.
      Et c’est bien ce que permet, mais s’il est de montant suffisant, le revenu garanti à tous : étudiants, artistes, femmes dites “au foyer” et qui aujourd’hui doivent être entretenues par un “conjoint” (en un seul mot), etc.

      3. Le troisième point aborde la vraie difficulté posée par la nécessité d’assurer à tous les moyens de vivre libre : où prendre l’argent nécessaire ?
      C’est tout le système capitaliste qui se trouve ainsi remis en question : car si on veut, a priori, trouver ce financement en réformant le système sans en changer les bases, outre que cela ne résout pas les plus graves problèmes, cela signifie qu’il faut redistribuer, c’est-à-dire prendre aux uns ce qu’ils estiment avoir “gagné” pour donner aux autres, regardés comme incapables de “s’insérer”. On est donc assuré de ne satisfaire personne.
      On ne peut qu’être d’accord avec Jean-Marie quand il dit qu’un revenu ne peut pas venir d’un ailleurs que le travail collectif. Il a également tout-à-fait raison de penser que la société n’est pas une somme d’individus indépendants, décidant seuls de ce qu’ils font, et qu’une validation collective est nécessaire. Car effectivement, si nous ne formons pas “société”, si la société humaine se délite, c’est précisément parce que notre monde est livré à la compétition “libre et non faussée”. C’est bien parce que c’est “le marché” qui décide des investissements et qu’il n’y a pas de validation collective que nous ne décidons ni ne disposons pas, collectivement, de cette énorme richesse que pourtant nous produisons ensemble (qui aurait été estimée… à 3.300 euros par personne et par mois) et donc que nous ne pouvons pas la partager.

      4. C’est de toute cette pseudo "loi” économique et financière qu’il s’agit de nous libérer. Or elle ne tombe pas du ciel, elle n’a pas toujours existé, elle ne nous est pas imposée comme une loi de la nature, universelle et immuable. Et en outre elle nous fait obligation de croissance, ce qui est évidemment impossible !
      Alors, réfléchissons ensemble : nous avons hérité d’une foule de connaissances et de beaucoup de moyens, que nous ne pouvons pas continuer à utiliser en fonction d’impératifs aussi vagues et nocifs que faire du profit, suivre le marché, créer des emplois, revenir au plein emploi … Nous avons besoin d’innover pour organiser la production de façon raisonnée, concertée, et de nous partager les richesses produites par les actifs. Or ce partage, il faut en prendre conscience, il oblige à remettre tout à plat.
      À commencer par la création monétaire. Cet outil, qui est aujourd’hui monopole des banques privées, doit être remis à la communauté et repensé. Parce qu’il doit être conçu, précisément, comme un flux de pouvoir d’achat qu’il s’agit de répartir entre tous. Et cela pour, d’une part, entretenir nos moyens, réaliser la production, assurer les services publics, et d’autre part, pour partager le flux des marchandises ainsi créées, en assurant à tous un revenu conçu non plus comme le paiement de son travail mesuré, comptabilisé, mais comme le moyen pour lui d’exercer au mieux ses activités.
      Car, dernière remarque, il est tout à fait faux de croire que livrés à eux mêmes les humains ne ficheraient plus rien de bon. C’est raisonner comme ceux qui s’opposaient à l’abolition de l’esclavage parce que les esclaves n’étaient pas des hommes, où comme ceux qui prétendaient que si on “accordait” un jour de repos aux travailleurs, ils le passeraient au bistrot, à se saouler, on a entendu des refrains semblables contre les congés payés, etc. Il suffit d’écouter avec quelle nostalgie un ancien mineur se rappelle le travail à la mine, dur, dangereux et mal payé, pour comprendre combien il en est fier et serait heureux de pouvoir encore exercer “son métier” !
      Mais pour arriver à cette abolition du salariat, à cette économie distributive, donc de partage, et qui changerait tout, il faut d’abord faire l’effort de l’imaginer, pour comprendre qu’elle est pratiquement possible.
      Or mieux vaudrait faire vite parce qu’elle est de plus en plus nécessaire !

  • Bonjour,

    J’adhère complètement à l’analyse de Jean-Marie. La question du revenu de base ou inconditionnel repose sur une erreur fondamentale à savoir son financement. Le point 3 de Jean-Marie le résume bien.

    L’erreur porte sur le fait qu’on détourne la finalité du travail. La vie en société n’est pas fondée, et n’a jamais été fondée, sur l’accès à un revenu mais plutôt sur l’accès à la participation aux activités collectives qui fondent la société. Si les sociétés pré-capitalistes étaient fondées sur des échanges non marchands, société de don institutionnalisée, où la monnaie prenait un autre caractère, la système capitaliste a imposé le rapport salarial, mais n’a pas imposé le travail. La question est donc l’utilité du travail qui permet de produire aussi bien des productions marchandes inutiles que des productions marchandes et NON marchandes (monétaire ou non) qui concourent à la richesse du groupe. La question qui se pose est donc de donner les moyens à tous à participer à l’activité et donc la vie en société. Et non, de poser les bases d’une segmentation de la société entre ceux qui refusent d’y participer et les autres. Et c’est là que la question du financement apparaît.

    Comment finance-t-on la protection sociale ? Y-a-t-il des cotisations sociales sur ce revenu ? Le revenu de base offre-t-il des droits sociaux ? Le salaire est le résultat d’une activité. Le revenu est le salaire + les revenus sociaux de transfert. Imposer un revenu de base c’est en définitive accepter qu’une partie de la population ne participe pas aux activités nécessaires au financement du revenu. Ce qui m’amène à la question fondamentale du financement de la protection sociale. En effet, dans le cas du revenu inconditionnel, on exclue l’idée de socialisation d’une partie de la rémunération, car une part du salaire est socialisée pour financer la protection sociale. Raisonnons en termes de mutualisation et de socialisation des richesses.
    Ainsi, l’idée d’un revenu inconditionnel individualise la vie en société et la désagrège, ce serait l’idée que la société n’est qu’une somme d’individus indépendants, ce qui est un retour en arrière. La protection sociale et la solidarité sont fondées sur l’idée de dette sociale et d’une forme de don/contre don. C’est la participation à la vie en société qui offre les droits sociaux, le revenu inconditionnel permet de sortir de cette vie collective.

    Quelle solution ? La valorisation des activités non marchandes est primordiale, ces activités qui concrètement amènent un surplus social sont à la base d’une autre société. Il faut sortir de l’idée que la richesse est purement monétaire. La participation à la société passe par un partage total du travail, nous ne sommes plus dans les sociétés traditionnelles qui imposaient une forme de solidarité mécanique, mais nous vivons dans des sociétés complexes qui fondent une solidarité organique, où chaque membre de la société a besoin des autres. Le travail est ce formidable vecteur qui fonde nos solidarités car c’est à travers lui que se traduit les droits sociaux. Ainsi, il faut non pas réfléchir sur l’obtention d’un revenu, mais sur le lien et le rapport salarial. Cela passe par le partage entre activité contrainte et non contrainte. C’est ici que le partage du temps de travail est fondamental. Dépasser le capitalisme nécessite de remettre en cause le rapport salarial et redéfinir l’utilité même du travail vers les activités non marchandes. Ainsi, il y a aussi un distingo entre salaire, travail et revenu à réaliser. Un après capitalisme, que j’appelle de mes voeux, n’est pas la disparition du travail mais du rapport salarial et donc de la subordination du travail au capital. Le revenu de base ne s’y attaque pas, il part du principe d’un droit lié à la naissance et non à la participation à la société, et conceptuellement j’ai du mal avec cette idée. Bref, partage du temps de travail vers minimum vital, développement d’activités non marchandes contre les activités marchandes inutiles, mutualisation des richesses, droits sociaux collectifs (et non individuels), dégagement du temps non contraints et redéfinition du vivre ensemble seraient les maîtres mots d’une alternative.

  • Totalement d’accord avec la contribution de Jean Marie Harribey, et bien d’accord avec celle de Guillaume Pastureau.

    Je suis d’avis toutefois de préciser un point :
    J.M.Harrubey écrit dans sa contribution :

    « 3) La proposition de revenu inconditionnel oscille entre la croyance qu’un revenu monétaire pourrait provenir d’un ailleurs que le travail collectif… »

    Dans ce « travail », Collectif ou pas, Il me paraît essentiel de distinguer le travail qui produit des biens matériels, consommables, et le travail qui n’en produit pas, bien que fort utile à la société. J’ai déjà écrit cela dans ma contribution du 16 janvier :
    « Un médecin, un enseignant, consomme nourriture, vêtements, a besoin d’un logement, utilise un scanner ou un bâton de craie.
Ces biens matériels ne sont créés que par l’agriculture et l’industrie... » Idem pour l’aide aux personnes âgées, et tout ce qui est social et environnemental.

    C’est parce que notre industrie a été délocalisée que des biens matériels nécessaires aux activités sociales et environnementales ont du être importés, que notre commerce extérieur est devenu déficitaire et que ce déficit s’est traduit nécessairement par un endettement quelque part. L’Etat, la Sécurité Sociale, l’Assedic, les caisses de retraite, se sont endettés. L’Etat a emprunté, l’Etat a vendu Renault, a vendu les autoroutes, GDF, ELF, France Télécom, et tant et tant d’autres choses.

    Bien sur l’idéologie libérale, le capitalisme financier, les banques, le social libéralisme ont poussé au crime, mais à la base il est fondamental pour nous de distinguer le travail productif de biens matériels, réels, et le travail d’utilisation de ces biens pour le bien être humain, social et environnemental.

    Guillaume Pastureau écrit :

    « La valorisation des activités non marchandes est primordiale, ces activités qui concrètement amènent un surplus social sont à la base d’une autre société. Il faut sortir de l’idée que la richesse est purement monétaire. »

    Bien d’accord, la richesse n’est pas monétaire mais matérielle. Bien d’accord la valorisation des activités non marchandes est primordiale, mais encore plus primordiale que la valorisation de ces activités est LE MOYEN de les réaliser, la possibilité de pouvoir utiliser des objets fabriqués pour la satisfaction des besoins humains.

  • Si j’ai bien compté je suis le 18e intervenant sur cette question du travail et du revenu de base. Rarement une question a suscité un débat d’une telle ampleur. Cela signifie que nous avons besoin d’un débat collectif, en profondeur et sur un temps long pour aboutir à une position d’ATTAC qui ne soit pas « bancale » et insatisfaisante pour tout le monde.

    Il me semble indispensable de poursuivre le débat au-delà de l’AG et, à cette fin de créer une liste de discussion spécialement dédiée à ce thème et ouverte à tous les adhérents.
    Ce qui suit ne repose que sur mes observations personnelles, bien que cette proposition me soit connue depuis pas mal d’années. Je n’ai jamais eu le temps d’y réfléchir en profondeur. Il est nécessaire à mon avis de répondre à un certain nombre de questions. :

    1. En quoi et à quelles conditions l’existence d’un revenu de base (ou salaire à vie, ou revenu d’existence, il faudrait d’abord savoir exactement de quoi on parle) implique-t-il un changement sociétal, un saut qualitatif émancipateur vers plus de libertés, plus de démocratie ?
    2. Y a-t-il un seuil du développement des forces productives à partir duquel le revenu de base est possible ? Serait-ce une « revendication » qui ne concerne que les pays « riches » ?
    En France le salariat constitue l’immense majorité de la population active. On doit donc pouvoir tirer des enseignements des luttes sociales, à visée toujours émancipatrice. La question du temps y est très importante, destinée à gagner du temps libre pour soi, au détriment du temps passé dans un lien de subordination, et pour enrichir son patron dans le secteur privé. Cette réduction du temps de travail s’est faite à la journée, à la semaine, à l’année (congés payés) ou sur toute la vie (âge de la retraite). Il y a donc eu extension du temps libre, payé, sans contrepartie de travail fourni, sous diverses modalités.
    • A la journée (les 8 heures) essentiellement pour une meilleure reconstitution de sa force de travail.
    • A la semaine assez récemment les 35 heures, utilisé de diverses façons : prendre son mercredi pour s’occuper des enfants, fournir aux média des tranches de cerveaux disponibles supplémentaires pour mieux accepter son sort, faire un 2e boulot pour gagner plus et consommer plus ou améliorer son confort personnel.(importance des magasins de bricolage)
    • A l’année avec l’allongement des congés payés, souvent consacrés à la culture (tourisme intelligent ou solidaire, succès des festivals d’été etc..)

    Mais seul le départ à la retraite, rupture du cordon ombilical de l’individu avec l’entreprise met celui-ci en position d’un choix nouveau : que faire de mon temps totalement libre ? Je ne sais pas s’il existe des études sérieuses sur l’activité des retraités mais j’observe autour de moi que ces prétendus « inactifs » développent une activité, bénévole le plus souvent, débordante dans le milieu associatif (ATTAC en regorge…), municipales, ou même continuent d’exercer bénévolement leur compétences mais dans un sens qui leur convient, souvent caritatif, y compris dans le « tiers monde ».

    C’est pourquoi je trouve tout à fait hors de propos la réflexion spontanée « On ne va pas payer quelqu’un à ne rien faire »

    Le mouvement ouvrier a d’ailleurs décidé de « payer quelqu’un à ne rien faire » mais uniquement par solidarité, quand celui-ci n’est pas ou plus en capacité de travailler. C’est notre système de Sécurité Sociale (maladie, accident, maternité, vieillesse, recherche d’emploi).

    En 1988, il y a ¼ de siècle, grâce à l’action d’ATD-quart-monde, le gouvernement Rocard a instauré le RMI, devenu par la suite RSA. Nous en sommes aujourd’hui à 2 millions de « bénéficiaires » d’un revenu très modique d’environ 500€/mois. Cela n’a aucunement transformé la société. La question du montant du revenu de base à partir duquel il aurait des vertus transformatrices est aussi une question essentielle.

    Si le revenu de base, comme son nom semble l’indiquer, n’assure que les besoins matériels nécessaires à la survie de l’individu (logement, habillement, nourriture et quelques autres) et le laisse ainsi libre d’exercer l’activité (ou la non activité) de son choix, rémunérée ou non, tous les besoins de la société seront-ils couverts, en particulier la sureté des citoyens (police), le règlement des conflits (justice) etc … ?

    Nous serons sans doute amenés à nous interroger aussi sur la notion de besoins, besoin d’être, besoin de paraitre, qui ne sont pas forcément incompatibles, sur le sens que chacun donne ou peut donner à son existence etc..

    Nous ne sommes plus dans l’économie, bien que ce projet doit avoir une cohérence économique, mais dans l’anthropologie.

    Il faut prendre le temps d’y réfléchir.

  • par quelle magie l’intitulé est passé de :

    — Résolution sur la question du travail et du revenu inconditionnel (fait le 16 janvier 2014A

    en

    — Résolution sur le travail, l’emploi et le revenu. (lettre d’attac reçue le 3 Avril 2014)

    Ce n’est, bien entendu, qu’une question...

    • Je suis contente que le débat sur une question aussi importante se poursuive et suscite l’intérêt qu’il mérite. Le changement de titre et de contenu de notre résolution sur "le travail et le revenu inconditionnel" résulte du blocage d’une partie du CA d’ATTAC sur cette question politique. Après avoir demandé au groupe ATTAC 19, dont émanent les 3 résolutions sur le travail et le revenu universel, de fondre ces 3 textes en un seul, ce que nous avons fait, il m’a été demandé de retirer notre résolution, ou bien de la transformer en vague appel au débat au sein d’ATTAC sur "l’emploi et le travail". La raison invoquée par le CA est le rejet d’une partie du CA de notre résolution...Egalement, les adhérents d’ATTAC ne seraient pas "prêts" à débattre de cela en AG, ce ne serait pas "démocratique" de mettre cette résolution en débat. Je ne comprends pas en quoi censurer un texte produit dans le respect du cadre fixé est plus "démocratique". Donc, je porte ci-dessous notre résolution, qui ne sera pas discutée en AG, à la connaissance des adhérents qui fréquentent le blog (trop peu nombreux, je suis consternée que pour toute la France, seulement 11 résolutions aient été produites, donc 3 par notre groupe en Corrèze !) :

      "I - Résolution : Abolir l’emploi, désaliéner le travail, garantir un revenu à tous.

      Il n’y a pas de crise économique mais une crise de civilisation. En effet, nous produisons beaucoup de richesse (3 300 euros par personne majeure et par mois, selon notre PIB), mais nous sommes mis artificiellement dans l’insécurité, la précarité et la peur du lendemain par le système qui nous écrase. Alors que ce système abolit massivement l’emploi, qu’il en abolit la dignité et l’accessibilité, il prétend le perpétuer en tant que norme et fondement irremplaçable de nos droits et de notre dignité. C’est l’emploi qui nous écrase, le marché de l’emploi, le système employeur-employé-marché de l’emploi, l’aliénation et la marchandisation du travail réduit à l’emploi, la destruction du travail et sa réduction au temps qu’on nous vole, sa réduction à ce qu’on a ou qu’on n’a pas, l’obligation d’avoir un emploi pour exister socialement. Ce système nous soumet à une injonction : « Trouve un emploi sinon tu n’es rien ! ». Tout en détruisant massivement l’emploi qu’il prétend créer. Il faut que l’emploi perde sa centralité dans notre conscience, notre pensée, notre imagination. Il nous faut comprendre que l’emploi est mort grâce au et à cause du capitalisme et que c’est un bien, car ça peut nous permettre enfin de travailler.

      ’’Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant’’, affirme la Déclaration Universelle des droits humains de 1948. Le niveau global des richesses que nous produisons le permet. Ce droit passe par un salaire pour tous, inconditionnel et suffisant, attaché à la personne et donc dissocié de l’emploi salarié détruit, précaire, aliénant que l’idéologie dominante nous présente comme ’’désirable’’. Ce droit à un revenu pour tous, un salaire à vie suffisant, s’inscrit dans un projet politique qui suppose la réappropriation de la richesse que tous, salariés ou non, nous produisons, qui suppose aussi le contrôle de l’émission de monnaie(s), qui suppose également des choix de production autogérés par les citoyens en fonction de leur utilité sociale. Ce droit à un revenu pour tous libère le travail, libère notre énergie pour contribuer au bien-être social, en nous dégageant de la domination du marché de l’emploi et de la peur du lendemain.

      En résumé : il n’y a pas de crise économique mais une crise de l’emploi et une destruction programmée du travail par le capitalisme. Notre travail, c’est-à-dire ce que nous faisons, travail consenti, choisi, désaliéné, sera seul créateur des biens répondant aux besoins et désirs de notre société dans le domaine social, culturel et écologique : notre société en autogestion dans laquelle les individus décideront collectivement de leur projet de vie.
      II – Un immense chantier pour ATTAC, une clé pour ouvrir sur un autre monde

      ATTAC peut jouer son rôle d’association d’éducation populaire en nous aidant à dessiner concrètement les contours d’une société libérée de l’asservissement de l’emploi au lieu de rester dans l’illusion qu’entretient la revendication d’un ’’emploi pour tous’’. Plutôt ’’un revenu pour tous’’ pour un travail et des humains libérés !

      La résolution ci-dessus est une réponse à la demande de contribuer à ’’approfondir le débat’’, ’’aider au positionnement d’ATTAC’’ et ’’alerter sur de nouvelles problématiques’’. Elle n’est QUE cela. Nous pensons qu’elle peut ouvrir sur un immense chantier. Nous savons aussi qu’elle va se heurter à beaucoup de ’’résistances au changement’’. Nous pensons qu’il est nécessaire de permettre et même de faciliter le débat tant l’urgence est grande face au double mur du fascisme et du réchauffement climatique qui grandit et se rapproche à toute vitesse. Reprendre espoir pour pouvoir redonner espoir, pour ce faire inventer et jeter les bases concrètes d’un autre monde possible. Nous pensons que c’est ce qu’il nous reste à faire collectivement. C’est ce qui nous anime et seulement cela ! Avec l’espoir qu’il y ait un vrai débat, non polémique, tourné vers l’avenir et la recherche de la vérité. La balle est dans le camp d’ATTAC !"

  • Pas d’accord avec le revenu inconditionnel. Que fait-on de ceux qui pourraient travailler mais le refusent et vivent sur le dos des autres ? Un fainéant squatte autant qu’un actionnaire. Qui ramassera les fraises ? On me répond il n’y pas de sot métier et que même au plus bas de l’échelle les gens attachent de l’importance à bien faire leur travail. Bien sûr que c’est vrai, mais pas tous ! J’ai travaillé 18 ans en usine dont 6 ans à la chaîne et 2 ans dans le bâtiment. Je milite à attac depuis onze ans, cette proposition ne m’attire pas et même me repousse.

  • Merci de contribuer à enrichir la discussion lancée par nos résolutions sur le travail et le salaire à vie, appelé aussi revenu universel. J’espère que nos points de vue, nos expériences du travail et de la lutte pourront être partagés en Assemblée Générale et à l’Université d’été. Le débat est la condition du progrès de la pensée et je me réjouis qu’il ait lieu au sein d’ATTAC ! Je note avec soin tous les arguments contre le salaire à vie qui se sont exprimés jusque-là. Ces arguments renforcent ma conviction qu’il y a une urgence à créer une pensée à gauche.

  • Le débat est ouvert et riche : enfin ! et tant mieux !
    Mais quand je lis , ci-dessus (7 avril , 12h28 ) , le texte originel de la motion "Abolir l’emploi etc.. ;" présentée par Frédérique Perrin , qui me parait tellement plus net , plus visionnaire ,
    plus riche anthropologiquement , que le texte de compromis caoutchouteux bricolé par le CA
    pour ne pas contrarier , j’imagine , quelques uns de ses membres les plus éminents attachés
    au logiciel " travailliste " , je ne peux m’empêcher de penser qu’on prive ainsi la foule des adhérents qui ne fréquentent pas le Blog d’un débat beaucoup plus incisif et plus porteur d’un potentiel de lutte adaptée à notre temps que celui , peu décoiffant , sur lequel ils auront à se prononcer . Mais bon...espérons que la commission dédiée qui devrait en sortir ne ronronnera pas et mettra le train en marche !
    Signe que l’idée du revenu inconditionnel progresse , j’espère , dans les têtes citoyennes et "politisées" : elle était le thème d’une assemblée citoyenne co-organisée , ce mardi 15 avril , à Valence , par le PG ( avec Corinne Morel Darleux ) et EELV ( avec Emmanuel Coux ) , et la participation de Paul Ariès .

    A ceux qui , comme J. Cl. Bauduret ( qui dit par ailleurs d’excellentes choses ), s’interrogent sur l’aptitude du Revenu inconditionnel à induire " un changement sociétal,
    un saut qualitatif émancipateur ..." , je suis tenté de répondre par une autre question , au
    niveau des pâquerettes ( qu’il importe de ne pas piétiner ! ) : " La précarité permanente,
    l’angoisse du lendemain qui pourrissent la vie de millions de nos concitoyens ... est-ce
    émancipateur ? Et leur éradication par la garantie d’un reveni inconditionnel et suffisant
    (cf Gorz et M. Louise Duboin ) ne serait-il pas , à l’évidence ,le formidable " changement
    sociétal " qu’il peine à voir ? " .
    Personnellement, je l’ai compris particulièrement en 95 , non dans une lecture , mais en participant cum pedibus à l’une des grandes "marches contre le chômage" , initiées par AC !, convergeant vers Amsterdam , à l’occasion du Traité éponyme . Les chômeurs rhônalpins qui m’entouraient , dont certains en dépression et au bout du rouleau , ne se
    lassaient pas de clamer leur slogan préféré : " Un revenu , c’est un dû ! " ( et " Un toit , c’est un droit " ... et comme cela résonnait fort !

  • Pour juger de la validité (ou non) d’une proposition il faut toujours pousser sa logique jusqu’au bout.
    Aussi, la question la question de fond se résume-t-elle à ceci : quelles seraient les conséquences politiques, économiques, sociales, morales de la mise en oeuvre d’un droit inconditionnel de fait à ne participer aucunement à la production de la richesse sociale (c’est-à-dire socialement validée) rendu possible par l’inconditionnalité d’un droit à recevoir et consommer une part "suffisante" de cette richesse ? Et donc quelles seraient les conséquences politiques, économiques, sociales, morales de la mise en place d’une société partagée entre une part indéterminée de producteurs / consommateurs de la richesse sociale et une part indéterminée de consommateurs non-producteurs de la richesse sociale ? "Part indéterminée" puisque l’appartenance à l’une des deux catégories plutôt qu’à l’autre, le passage de l’une à l’autre, l’alternance entre l’une et l’autre sont laissés au libre choix des individus.

    En outre, comme le demande J.C. Bauduret ci-dessus : où situer exactement l’émancipation dans tout cela ?

    Patrick Braibant
    Adhérent Attac n° 69912

  • Oui, d’accord avec vous pour "pousser la logique jusqu’au bout" afin de juger de la validité d’une proposition : je suis favorable à ce qu’on pousse jusqu’au bout la logique de la lutte des classes pour se réapproprier ce qui est à nous : tout ! en expropriant la classe possédante qui sinon, elle, va "pousser sa logique jusqu’au bout en nous enterrant. Si on essayait autre chose que la collaboration de classe et la soumission sous la houlette d’idéologues bourgeois ? Si on essayait la lutte, l’imagination et le collectif au lieu d’en remettre une couche avec le compromis, le renoncement et le narcissisme ? Je ne cherche pas à avoir raison en défendant un revenu suffisant pour tous, un "salaire à vie", je cherche comment échapper au sort que la bourgeoisie nous assigne = la pauvreté matérielle, intellectuelle et morale ! Ma logique est une posture de classe et je suis prête à la pousser jusqu’au bout pour voir si elle est valide.

    • Bonjour Frédérique,

      «  je suis prête à la pousser jusqu’au bout [« ma logique »] pour voir si elle est valide. » Entièrement d’accord ! C’est pourquoi il est nécessaire de proposer quelques hypothèses et projections pour tenter de repérer les principaux tenants et aboutissants de cette logique.

      C’est ce que j’ai essayé de faire et ma conclusion (peut-être provisoire et assurément sujette à discussion) est que la possibilité de l’incondtionnalité d’un revenu "suffisant" totalement déconnecté d’une quelconque participation à la production sociale, risque d’être tuée par les exigences mêmes de cette inconditionnalité.

      Je suis parti de l’hypothèse (et de l’exigence) formulée dans l’une des résolutions initiales que vous soutenez : un revenu « suffisant » ce serait « au moins » 2200 € par mois et par adulte.

      Cela fait donc 26 400 euros par an. Comme la résolution indique qu’il s’agit d’un minimum je suis parti du principe que ce revenu était dépensé en totalité et qu’il fallait que la société produise chaque année de quoi satisfaire les besoins permis par un tel revenu.

      La France compte aujourd’hui environ 50 millions de personnes de 18 ans et plus.

      26 400 € x 50 millions = 1 320 milliards € (j’espère ne pas m’être emmêlé dans les zéros au cours du calcul...)

      Sur la base d’un revenu mensuel minimum de 2 200 € par adulte, la société française doit fournir chaque année une production sociale d’au moins 1320 millards € pour répondre à ce qui s’approche de la « consommation des ménages » de la comptabilité nationale.(par comparaison la consommation des ménages en 2012 a été, selon l’Insee, de 1130 milliards € http://www.insee.fr/fr/themes/comptes-nationaux/tableau.asp?sous_theme=1&xml=t_1101 )

      Mais ce n’est pas tout. La société doit encore fournir d’autres productions :

       celles nécessaires à assurer l’avenir de son économie : chaque année il faut pourvoir au renouvellement d’une partie des moyens de production existants et en créer de nouveaux selon des critères qui dépendent des logiques sociales dominant la société concernée au moment considéré : par exemple, de notre point de vue, des moyens de production sobres énegétiquement, dont la fabrication et le fonctionnement sont le moins gourmand possible en ressources rares et permettant une réduction de la pénibillité au travail

       celles exigées par les consommations publiques et collectives : consommation des administrations, production et entretien des équipements collectifs (voies de communication, écoles, hôpitaux, crèches, musées, équipements sportifs etc.)

       celles, exportées, qui permettent d’importer ce qui n’est pas produit dans le pays (sauf à imaginer un pays vivant en autarcie complète)

      Je ne suis pas du tout économiste mais j’évalue « à la louche » la production sociale totale exigée par l’hypothèse de la résolution à au moins l’équivalent de 2 000 milliards € par an. C’est d’ailleurs à peu près le PIB actuel de la France.

      J’en viens maintenant à la question qui est décisive pour notre sujet : quel volume de travail faudrait-il pour assurer une telle production ? Que ce travail soit réalisé dans des conditions marchandes / capitalistes, étatiques, socialistes, au moyen d’une activité librement choisie, peut importe ici. Dans tous les cas il faut lui consacrer du temps. Et un temps sans doute considérable. Produire chaque année des biens et services à hauteur de 2000 milliards € ne se fait pas d’un coup de baguette magique.

      Dans les conditions du PIB actuel (également 2000 milliards €) le volume annuel total de travail est de 40 milliards d’heures ! La population active (qui, statistiquement, inclut les chômeurs) étant de 28 millions de personnes, cela fait un peu plus de 1400 heures par individu et par an
      http://www.insee.fr/fr/themes/comptes-nationaux/tableau.asp?sous_theme=5.2.2&xml=t_6213

      On pourra certes réduire ce volume en mettant fin à des productions socialement constestables voire carrément nuisibles. Mais a contrario il faudrait consacrer un volume de travail plus important qu’aujourd’hui à des secteurs où les besoins sont immenses (par exemple tout ceux qui relèvent de la transition écologique)

      Il n’y pas de miracle : l’exigence du maintien d’un haut niveau de vie (2 200 € cela fait combien de fois le revenu mensuel moyen du Mali, de la Bolivie, du Sri Lanka ?) couplée à celle de répondre à de nombreux besoins non satisfaits risque de nécesssiter la contribution à la production sociale de la grande majorité de celles et ceux qui sont en mesure d’y participer.

      Dès lors, de deux choses l’une :

       Ou bien, malgré l’instauration (ou simplement la perspective) d’un droit inconditionnel à un revenu « suffisant », la grande majorité des gens pensent que le maintien d’un haut niveau de vie (même dans des conditions très différentes d’aujourd’hui) ainsi que les nouveaux besoins à satisfaire non ou mal pris en compte dans la société actuelle, nécessitent la participation de tous à la production sociale, et non seulement le pensent mais agissent en conséquence en apportant leur contribution productive : dans ce cas, un tel droit posant la complète dissociation entre revenu et participation à la production sociale, apparaîtra quelque peu à côté de la plaque car sans véritable objet. Dans cette première configuration possible, et pour ce qui concerne les questions du travail, une politique de l’émancipation devrait pouvoir se formuler autour du fil conducteur de la démocratie dans le travail. Sous l’angle duquel seraient apportées des réponses aux questions du « que produire ? » du « pour qui produire ? », du « comment produire ? », des formes de gestion de propriété, du temps de travail (c’est-à-dire de sa réduction conséquente pour que tous travaillent en travaillant moins), de la hiérarchie des salaires ,de la pénibilité, de la polyvalence etc. Et toujours en lien avec les impératifs (et les limites) que l’exigence écologique pose à l’activité productive des sociétés.

       Ou bien, seconde configuration possible, une fraction vraiment significative de la société se saisit de ce droit et applique de manière rigoureuse l’inconditionnalité en participant faiblement ou pas du tout à la production sociale, tout en prélevant une part de cette dernière à la même hauteur minimale (dans notre exemple les 2 200 € mensuels) que le reste de la population : dans ce cas l’objectif de maintien d’un haut niveau de vie et de réponse aux besoins non satisifaits risque d’être difficilemment tenable. Surtout si l’on met résolument en oeuvre (et il le faut !) une politique programmée et volontariste de réduction du temps de travail pour tous. Et politiquement parlant, comment gérer la division de la société entre producteurs / consommateurs et consommateurs non producteurs ? Je pense vraiment qu’il y a là plus qu’un problème mineur, sur lequel on ne peut faire l’économie de réfléchir car il pourrait bien devenir le centre d’une conflictualité sociale inédite. Je pense aussi que dans une telle configuration il serait bien difficile de définir les objets d’une politique de l’émancipation commune à tous.

      « Si on essayait autre chose que la collaboration de classe et la soumission sous la houlette d’idéologues bourgeois ? » Alors là, j’approuve pleinement ! Mais je ne suis pas sûr que la revendication d’un droit universel, inconditionnel, permanent à une dissociation absolue entre revenu et contribution à la production sociale soit la voie royale pour rompre avec cette collaboration et cette soumission.

      En ce qui concerne le sujet qui nous intéresse ici, je pense que la meilleure entrée serait une réflexion d’ensemble sur la question-clé de la distribution des différents temps sociaux et du contenu à donner à chacun de ces temps (temps de la production, temps des relations affectives et de la famille, temps de la politique, temps de la consommation, temps du loisir (de l’activité sans autre finalité qu’elle même)... Il s’agirait de mener de front une critique sans merci de l’actuelle distribution et de l’actuel contenu de ces temps (dominés par les logiques capitalistes/ marchandes/étatiques) et une réflexion sur des distributions et contenus alternatifs en partant du principe que personne n’a vocation ni à être exclu ni à s’exclure d’aucun de ces temps.

      S’interroger sur la pertinence du droit inconditionnel au revenu n’impique ni ne présuppose aucune exaltation béate du travail, aucune croyance en une nature prétendument « travailliste » des humains. Et l’on peut emprunter au célébre mot d’ordre d’ André Gorz, « non plus vouloir s’émanciper dans le travail mais s’émanciper du travail », en en atténuant toutefois l’opposition binaire un peu trop systématique, pour le reformuler de la manière suivante : « s’émanciper autant qu’il est possible dans le travail tout en s’émancipant partiellement du tavail »

      P. Braibant